Noé Delpech n’est pas de ceux qui trace leur vie à l’avance. Il s’est laissé porter par les rencontres, les opportunités et les défis. Naviguer, pour lui, a toujours été une aventure collective, où la performance va de pair avec l’humain.

« Je suis très à l’aise dans la vie de groupe, je m’adapte facilement », confie-t-il. Ouvert et positif, il tisse rapidement des liens et voit le meilleur en chacun ; une qualité précieuse en équipage, où tout repose sur la confiance.

Noé grandit à La Réunion, entre mer et montagnes. C’est son père qui l’initie à la voile dès l’âge de sept ans. Il débute en Optimist, entouré d’un petit groupe de copains avec qui il découvre la régate. Dix gamins, le même niveau, la même flamme. La compétition devient un jeu. « Enfant, ça s’est fait naturellement. Je n’ai jamais rêvé des Jeux Olympiques, mais j’adorais suivre la voile, lire les magazines, je connaissais tous les noms, que ce soit en course au large ou en dériveur. Ça me faisait un peu rêver, mais je ne m’étais jamais dit que je deviendrais régatier. »

Ce sont les résultats, l’énergie du groupe et le plaisir de se confronter aux autres qui l’entraînent plus loin. « On était un bon groupe de jeunes, et on s’est très vite tiré la bourre », se souvient-il en souriant.

Avec Morgan Lagravière, il forme ensuite un duo prometteur en 420, coaché par Gabriel Jean-Albert, un jeune entraîneur tout juste sacré champion du monde dans cette catégorie. Résultat : podium au championnat de France, deux titres mondiaux chez les moins de 17 ans… Le talent s’impose, la Fédération Française de Voile repère le binôme. En 2003, Noé rejoint le sport-études à Antibes, puis le Pôle France à Marseille, sa ville d’adoption depuis plus de vingt ans.

S’enchaînent alors les saisons en 49er, une série olympique aussi technique qu’exigeante. Noé représente la France lors de cinq Olympiades, remportant une belle 5ème place à Rio en 2016 avec son coéquipier Julien d’Ortoli. Un résultat solide, dans une discipline où la moindre erreur se paie cher.

Ce qui le porte, au-delà des classements, c’est sa force de caractère : un calme communicatif, un optimisme inébranlable. Après une non-sélection douloureuse pour les Jeux de Tokyo avec Matthieu Frei, malgré une médaille d’argent aux Mondiaux d’Aarhus, et un arrêt imposé ensuite par le COVID, il traverse une période de doute. Fort d’un master en management, marketing et communication, il s’interroge : faut-il tourner la page ? Mais la passion pour la voile l’appelle encore. « Je me suis dit : la voile, c’est ce qui me plaît le plus, c’est là où je suis le plus épanoui, là où j’ai l’impression d’être le meilleur, d’apporter le plus aussi. »

Aujourd’hui, à 39 ans, Noé regarde l’horizon autrement. Toujours aussi curieux, il rêve encore d’explorer un nouveau terrain de jeu : la course au large. En équipage ou en solitaire, ce défi le titille. Il aime tester ses limites, voir comment il réagit quand le vent tourne et que tout devient incertain. « J’aime me mettre dans des situations inconfortables, observer comment je me comporte quand il y a du mauvais temps, et comment je relève ces défis. » Cet été, il devrait d’ailleurs découvrir la vie à bord du maxi-trimaran Sails of Change.

En parallèle, il cultive son goût pour l’aventure, la découverte et les moments partagés entre amis : des escapades à vélo, comme le tour de Corse sac au dos, ou simplement des levers de soleil en mer. Ce besoin d’espace, de dépassement de soi et de convivialité ne le quitte jamais.

Pour les jeunes qui se lancent, son conseil est limpide : « Ne vous donnez pas de limites. Il faut faire ce qu’on aime, sans se poser trop de questions. » Une philosophie ancrée dans l’expérience d’un marin qui avance au rythme des opportunités, mais avec une boussole bien à lui : celle du cœur et de la passion.

Noé Delpech, Tacticien de Sails of Change 8